Le
plus souvent les tumeurs de la vessie ou polypes de vessie sont découvertes
à la suite de coloration rouge des urines que l'on appelle hématurie.
Les tumeurs sont constituées de cellules anormales avec des vaisseaux
anormaux et fragiles qui saignent facilement. Les tumeurs peuvent être
découvertes fortuitement lors d'une échographie faite pour
une autre pathologie. Le tabac est un facteur favorisant la naissance de
ces tumeurs.
Il y a deux sortes
de tumeurs de vessie, celles qu'on appelle les tumeurs superficielles (dites
bénignes) et celles qui atteignent le muscle et que l'on nomme des
tumeurs infiltrantes. Seuls ces dernières sont considérées
comme de véritables cancers mais les premières risquent de
récidiver et nécessitent une longue surveillance. Il est
donc important de retirer cette tumeur afin de l'analyser et de savoir
comment traiter la patient.
La présence
d'une tumeur de vessie doit faire rechercher une autre tumeur dans les
reins et les uretères. On réalise alors un scanner abdominal
(ou une urographie) pour voir les bassinets, les uretères et l'ensemble
de la paroi vésicale.
Tumeur de vessie végétante
dans la lumière de la vessie (échographie).
Urographie montrant une absence
d'opacification de la partie gauche de la vessie.
Scanner montrant un
polype dans le bassinet gauche
L'aspect visuel
de la tumeur permet déjà de préciser (sans certitude)
si le polype est superficiel ou infiltrant. Si ce polype se présente
comme une anémone de mer, il est probable que celui-ci soit superficiel.
Au cas où il se présente comme une grosse masse irrégulière
et dure, il y a un risque de cancer. Le polype peut aussi être plan
et rouge, il n'est visible qu'en endoscopie et est alors très agressif
(appelé carcinome in situ CIS).
Ainsi, ce ne
sont pas toujours les plus exubérants qui sont les plus préoccupants.
Les photos suivantes
montre la différence entre les deux types de tumeur.
Tumeur bénigne
de vessie en endoscopie
Vidéo
de résection avec coagulation des berges
Tumeur de
vessie cancéreuse
Les risques évolutifs
de ces tumeurs de vessie sont la récidive et le risque d'aggravation
et de passage au stade infiltrant (cancer). C'est pour cette raison qu'il
est important de les retirer en totalité, les analyser et de surveiller
le patient longtemps. Le patient doit prendre conscience que ce suivi régulier
est capital.
Le premier temps
du traitement consiste à faire une endoscopie avec résection
de ces polypes par les voies naturelles. Une anesthésie générale
ou une péridurale est requise. La photo ci-dessous montre l'anse
de résection électrique qui nous permet de débiter
la tumeur en petits fragments qui seront évacués par le tube
métallique introduit dans l'urètre.
Par la suite,
une sonde en plastique avec un lavage continue de la vessie permet l'éclaircissement
des urines.
En général
le patient garde cette sonde entre 1 et 5 jours suivant la taille de la
tumeur et la fragilisation induite de la paroi vésicale. la paroi
vésicale fait normalement 3 mm d'épaisseur. Pour bien analyser
la tumeur, il faut visualiser le muscle et donc quasiment toute la paroi.
Des trous sont
obligatoirement réalisés lors de la résection et la
nature doit ensuite les colmater. Cela prend 3 à 7 jours en fonction
de la taille du trou. Si le trou n'est pas solidement colmaté, les
urines peuvent fuir autour de la vessie à l'ablation de la sonde.
Cela n'est pas dangereux mais douloureux. La sonde est alors remise 1 ou
2 jours.
Résection
de la paroi de la vessie. A gauche, on voit un cratère dans la muqueuse
et le muscle. A droite, on distingue les alvéoles brillantes de
la graisse péri-vésicale. Ce trou dans la paroi nécessite
4 ou 5 jours pour se colmater solidement.
Après
avoir retiré cette sonde, le patient peut ressentir quelques brûlures
lors de la miction et ira fréquemment aux toilettes durant les premiers
jours. Ces signes irritatifs sont secondaires à la brûlure
vésicale qui entraîne une stimulation du muscle vésical.
Ce muscle répond par une contraction et donc une envie d'uriner.
Par la suite,
il peut exister, dans un cas sur dix, la chute d'une "croûte" au
niveau d'un vaisseaux sanguin. cette chute secondaire aux mouvements de
la vessie entraîne une hémorragie au niveau des urines. Si
le patient peut uriner, il suffit qu'il boive abondamment. Le saignement
s'arrête spontanément en 24 - 48 heures. Au cas où
le saignement est trop important, des caillots se forment dans la vessie
et empêchent le patient d'uriner. Il doit alors consulter en urgence
afin qu'une sonde et un lavage soit démarré durant 24 heures.
Le risque de saignement est
majoré si le patient prend un médicament pour préserver
les vaisseaux (aspirine par exemple)
Les résultats
d'analyse des polype
Naturellement
il existe des grades d'agressivité au sein des tumeurs superficielles.
Ces grades reposent sur le degré d'infiltration du polype dans la
paroi de la vessie et sur l'aspect régulier ou non des cellules.
Degré
d'infiltration du polype dans la paroi de la vessie :
A gauche, le
polype infiltre la muqueuse superficielle de la vessie.
Au milieu, il
s'enfonce plus profondément dans la vessie. S'il reste bénin,
il est plus agressif et le risque futur de cancer est plus important.
A droite, il
dépasse la muqueuse et infiltre le muscle, on parle alors de cancer
car l'évolution de cette tumeur est totalement différente
des deux premières.
En cas de tumeurs
très superficielles, une autre résection du lit de la tumeur
est faite trois mois plus tard. Au cas où il n'y a plus de tumeur,
le patient doit être régulièrement et impérativement
suivi. Cette surveillance repose sur la pratique régulière
de fibroscopies vésicales, d'analyses d’urines à la recherche
de cellules anormales et d'échographies.
Des signes d'alertes
doivent aussi faire consulter : urines rouges, brûlures avec mictions
fréquentes ne disparaissant pas malgré un traitement antibiotique.
Ce "bouillonnement vésical" peut être un signe de transformation
de la maladie vésicale.
Au cas où
il y a encore de la tumeur à 3 mois ou s'il s'agit d'une tumeur
d'emblée plus agressive, la maladie vésicale devient préoccupante.
Il convient éventuellement de retirer les nouveaux polypes puis
de prévoir rapidement un traitement pour essayer d'enrayer la maladie.
Le traitement souvent utilisé consiste à injecter dans la
vessie des bactéries de la tuberculose (BCG). La vessie réagit
le plus souvent en faisant une cystite et il est possible que la réponse
de l'organisme contre ces bactéries soit également dirigée
contre les cellules tumorales.
On peut aussi
utiliser une chimiothérapie locale comme l'Amétycine.
Le premier est
classiquement utilisé dans les tumeurs profondes et agressives et
le second dans les tumeurs plus superficielles.
On obtient donc
souvent un enrayement des récidives des polypes. L'arrêt du
tabac est impératif pour contrôler la maladie.
Au cas où
le patient présente un cancer de vessie, la maladie est grave car
très agressive et nécessite un traitement agressif. Un bilan
à la recherche de localisation à distance de ce cancer est
alors réalisé. Le patient fait un scanner de l'abdomen et
des poumons.
S'il n'y a pas
de localisation extérieure décelable par ces examens, il
est possible de guérir le patient de son cancer. En cas de localisation
à distance, les résultats dépendent de la réponse
à la chimiothérapie.
Classiquement,
on réalise l'ablation totale de la vessie (prostatocystectomie).
Une chimiothérapie peut ensuite être nécessaire surtout
si des migrations à distance existent.
Si la tumeur
est trop volumineuse et profonde, deux cures de chimiothérapie peuvent
être réalisées avant la chirurgie. Ces cures servent
à traiter une maladie potentiellement extra-vésicale d'emblée.
Si l'ablation
de la vessie est choisie, les urines provenant des deux reins doivent être
dirigées vers un nouveau réservoir ou une sortie inhabituelle.
Pour cela, différentes possibilités peuvent être envisagées.
Mais, il ne faut pas perdre de vue que le cancer de vessie est grave et
tue ! Il est donc capital de s'attacher à guérir le patient.
Il faut ensuite choisir la solution la plus adaptée à l'âge
et à l'activité du patient.
Les uretères
dans un segment de grêle (intervention de Bricker)
La réimplantation
des deux uretères dans un segment de tube digestif dont les vaisseaux
nutritifs ont été respectés. Il s'agit le plus souvent
d'une anse grêle. L'urine est collectée par une poche adhésive
appliquée sur la peau non loin de la ceinture. Elle est cachée
par le pantalon. Le changement de l'image corporelle est initialement difficile
mais 3 mois après, la reprise d'une vie normale est effective dans
plus de 80 % des cas.
Je propose en
priorité cette dérivation qui présente peu de complications
pour un confort certain et durable. Le patient dors bien, est continent
et est réellement satisfait. Lorsqu'il revient 6 mois ou 1 an plus
tard, son moral est excellent. Tout ce que l'on espère à
ce moment est que le cancer ne revienne ... jamais !
La vessie artificielle
(vessie de remplacement ou néo-vessie)
Une vessie artificielle
recrée à partir de tube digestif détubulé pour
annihiler ses contractions peut être aussi réalisée.
Cette dérivation (entérocystoplastie) à l'avantage
de conserver l'image corporelle. Elle a l'inconvénient d'obliger
le patient à mettre un réveil à 4 heures du matin
pour uriner. Sans quoi, le lit sera mouillé. Les patients sont parfois
incontinent le jour si le sphincter est abîmé. Il faut bien
boire pour évacuer le mucus fabriqué par le tube digestif.
Scanner
d'une vessie de remplacement. Elle apparaît morphologiquement identique
à une vessie. Mais son fonctionnement est différent.
Les uretères
à la peau
Le geste le plus
simple et le moins risqué est la mise à la peau des deux
uretères. Il n'y a pas d'intermédiaire de communication ni
de coutures internes. L'inconvénient, c'est qu'il faut le plus souvent
placer une sonde dans chaque uretère et les changer tous les 6 semaines.
Il faut aussi placer deux poches sur le ventre pour récupérer
les urines. On réserve souvent cette intervention aux patients fragiles
ou fatigués du fait de sa simplicité et de sa réalisation
possible par coelioscopie rétro-péritonéale.
Il est possible
de lier un uretère afin de n'avoir qu'une seule poche mais le rein
obstrué peut se compliquer d'une infection de l'urine stagnante.
Il est aussi
possible d'aboucher un uretère dans l'autre mais l'anastomose est
parfois délicate.
Le rein à
la peau
En cas de masse
vésicale inextirpable, le plus simple mais le moins confortable
est la néphrostomie. On place sous anesthésie locale un tube
plastique dans le dos qui permet à l'urine de s'éliminer.
Naturellement, la position allongée n'est guère confortable.
Ce geste est en général temporaire.
Les uretères
dans le colon (intervention de Coffey)
La fixation des
uretères dans le rectum (Coffey) est astucieuse car on utilise un
réservoir naturel. Il est impératif de contrôler auparavant
que le sphincter anal du patient est apte à retenir 500 ml d'eau
chaude sans fuite.
La poche continente.
Enfin, on peut
utiliser un système de poche dite continente. La nouvelle vessie
en intestin est fixée sous la peau et un orifice avec valve anti-retour
(appendice par exemple) permet à une sonde de pénétrer
et de drainer l'urine mais empêche l'urine de sortir spontanément.